De la maternelle au post-bac, l’enseignement privé catholique scolarise en Vaucluse près de 17000 élèves dans plus de 48 établissements dont 5 internats. L’affaire sordide des violences et viols de près de 200 enfants et adolescents par des religieux de la congrégation des prêtres du Sacré-Cœur de Jésus de Bétharram, des membres du personnel et des élèves au sein de l’établissement catholique de Betharamm (Pyrénées-Atlantiques) n’est pas sans interroger sur ce qui se passe ici aussi.
L’Enseignement privé catholique de Vaucluse, financés sur les deniers publics, scolarise près de 6000 élèves dans 27 écoles primaires de la maternelle à l’élémentaire, 6000 élèves dans 11 collèges, 6 lycées d’enseignement général et technologique, 2 lycées d’enseignement professionnel, 2 lycées d’enseignement agricole, des formations Post bac (BTS, Prépa, et formation par alternance). C’est un poids lourds qui pèse sur les finances publiques au bénéfice de l’institution religieuse (le diocèse) et de l’esprit religieux sectaire (« Éduquer dans nos établissements ne peut se concevoir qu’au regard d’un projet éducatif fondé en Christ« , extrait du site internet de l’enseignement catholique de Vaucluse). On retrouve ces établissements dans plusieurs villes du Vaucluse notamment Apt, Avignon, Cavaillon, Monteux, Orange, Pertuis, Sorgues, Valréas et Carpentras qui draine des centaines d’enfants de la ville et des villages alentours .
Prédation sexuelle: l’horreur de la bienpensance religieuse
Betharamm peut-il être un cas isolé? Difficile de l’envisager tant les victimes des religieux se sont révélées êtres des milliers dans toutes la France à briser l’omerta des complices de ces crimes. A présent dans les Pyrénées-Atlantiques ont estime qu’à côté des 200 victimes qui se sont regroupées pour porter plainte près de 900 anciens élèves seraient concernés. Les enfants de notables étaient épargnés dont certainement ceux de l’actuel 1er ministre (1) de notre République laïque et de sa femme enseignante de catéchisme dans l’établissement.
Parmi les victimes se trouvent plusieurs orphelins et enfants de parents divorcés, certains élèves tentaient de s’évader de l’institution, d’anciens élèves relatent des suicides d’élèves au sein de l’établissement. Comme un aveu du sordide de l’enseignement catholique et de sa machine infernale, la présidente de la Conférence des religieux et religieuses de France, Véronique Margron, déplore que « ni la congrégation de Bétharram, ni l’Église et ni le rectorat n’ont prêté attention aux signaux ».
Pourtant les établissements scolaires ont l’obligation de protéger les élèves contre toute forme de violence, qu’elle soit exercée par des camarades, des enseignants, du personnel. Le signalement à la justice et aux instances des comportements « inappropriés » est obligatoire. Ce qui est loin d’être la généralité notamment dans les établissements privés où les intérêts financiers et de caste prédominent. La responsabilité civile et pénale des institutions peut être pourtant engagée en cas de manquement à cette obligation.
Sur proposition de la « France Insoumise »’ et présentée par la présidente Y.Braun-Pivet, l’Assemblée nationale a voté enfin de son côté la création d’une commission d’enquête sur « la prévention des violences dans les établissements scolaires »
Des complicités de croyants et de classes sociales
Nul doute que la complicité entre l’église, les diocèses catholiques, les notables et politiciens, les hauts fonctionnaires ne fonctionne de la même façon un peu partout dans le monde, en France (illustration: à « Betharamm » cela faisait plus de 30 ans que l’institution catholique n’avait pas vu d’inspecteur dans ses locaux) et donc en Vaucluse.
Et en Vaucluse où règne la confusion des rôles …
La confusion des rôles conduit inéluctablement à des excès voir à des complicités peu reluisantes dans la vie courante. Le diocèse du département de Vaucluse n’a-t-il pas été durant de longues années piloté par un intégriste radical proche de l’extrême-droite faisant régner la terreur, imposant le silence à toute pensée « hérétique » et aux plus de1000 enseignant-es salarié-es, jouant du rapport de force et de connivence avec les pouvoirs publics. N’hésitait pas à mener une chasse à l’homme contre de jeunes exilés africains réfugiés dans un bâtiment appartenant au diocèse (affaire « Rosemerta ») et à initier la lutte contre la responsable de l’association de solidarité. Localement à Mormoiron, l’édile présidant aux destinés du village mélangeait allègrement les rôles et bafouait les principes de la laïcité républicaine en faisant ériger sur fonds publics un monument religieux à côté de l’arrêt de bus du village; n’hésitant pas aussi à participer officiellement à des cérémonies religieuses.
Faute de statistiques, d’investigations de la presse régionale et départementale, d’informations des services de polices et de justices vauclusiens, de libération publique de la parole des victimes ou de leurs parents il est très difficile de briser l’omerta monstrueuse dans notre département. Pourtant c’est une nécessité tant pour les victimes de violences physiques et psychiques que pour l’ensemble de la société (pour adresser un témoignage, il est possible de contacter : temoignages-violences@mormoiron.org – anonymat garanti).
Du « flouz » public toujours plus pour le privé: 15 060 milliards d’euros
Enseignants payés par l’Etat (les contribuables) qui assure (2) leur salaire à hauteur de près de 56% rien que pour les maternelles et primaires, tout comme les communes (les contribuables) qui y participent via le forfait communal dont le montant doit être équivalent au coût des classes correspondantes de l’enseignement public. Et cela passe par le chauffage, l’électricité, les personnels de l’école, comme les Atsem, mais aussi l’agent qui fait la circulation devant l’école, le jardinier qui entretien les espaces verts et les travaux de réfection d’une toiture, etc… Parfois on y inclut illégalement les dépenses d’investissement totalement hors forfait et c’est aussi souvent là que des petits arrangements se font entre politiciens locaux et responsables religieux d’autant que le calcul du forfait communal reste à la discrétion des villes. La Cour des Comptes révélait l’an dernier que le financement public atteignait 73 % du budget de l’enseignement privé,
Dans la loi et le budget 2024 imposé par le 49.3 du gouvernement du catholique François Bayrou et Macron (qui a fait sa scolarité chez les jésuite et où sa femme était enseignante) il est prévu au titre des parts « personnels » et « matériel » du forfait d’externat que l’État verse 698 991 983 € aux établissements d’enseignement privés sous contrat. Tout est prévu : au titre des dépenses de fonctionnement à caractère directement pédagogique 4 022 632 €, mais aussi car il ne faut rien laisser au hasard: au titre des Droits de reproduction d’œuvres protégées dans le premier degré 1 083 241 €, au titre des Droits d’auteur 175 100 €, etc. Les associations liées à l’enseignement privé ne sont pas oubliées : 606 850 € de subventions en 2024. La Fédération sportive éducative de l’enseignement catholique (l’UGSEL) aura sa part du gâteau. (3)
En parlant de gâteau voici la cerise : dans les îles Wallis et Futuna l’enseignement primaire est concédé à l’Eglise catholique sur le fondement de la loi Falloux (1850) et du statut qui régit ces îles depuis 1961. La Mission catholique qui gère la quinzaine d’écoles pré-élémentaires et élémentaires se verra allouer ainsi 1 895 312 €. La Polynésie française n’est pas non plus oubliée : 1 000 000 € sont versés à la Collectivité territoriale à l’intention des écoles privées confessionnelles.
Les données globales les plus récentes établissent qu’en 2021, la manne publique totale
(État + collectivités territoriales + autres administrations) pour l’enseignement privé hors
contrat et sous contrat (à l’exclusion de l’Enseignement agricole) a représenté 15 060 milliards d’euros (4). A ces subventions s’ajoutent la taxe d’apprentissage ainsi que les déductions fiscales offertes aux particuliers et aux entreprises faisant des dons aux écoles privées. Les établissements scolaires catholiques sont les principaux bénéficiaires de l’ensemble des financements directs et indirects (5).
Depuis 2016, plus d’un milliard d’euros ont été versés par les régions françaises à l’enseignement privé.
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notes
(1) Président du Conseil général des Pyrénées-Atlantiques entre 1992 et 2001 et ministre de l’Éducation nationale entre 1993 et 1997, François Bayrou conteste en mars 2024 avoir eu connaissance d’abus sexuels à Notre-Dame de Bétharram et se défend d’avoir interféré dans cette affaire à l’époque où il était ministre. Mediapart révèle dans un article paru le 5 février 2025 que François Bayrou, devenu Premier ministre depuis le 13 décembre 2024, aurait été informé dès 1996 par une enseignante, Françoise Gullung, et par l’infirmière de l’établissement de violences physiques commises sur des élèves. Peu après qu’une plainte avait été déposée contre un surveillant général, Marie-Paul de Behr, il avait à l’époque défendu l’institution — où sa femme était catéchiste et où l’un de ses fils était scolarisé — en parlant d’« attaques » vécues par de nombreux Béarnais « avec un sentiment douloureux et un sentiment d’injustice », comme l’atteste un article de Sud Ouest de l’époque. Il a aussi rencontré à sa demande en 1998 le juge d’instruction saisi de l’affaire de violences sexuelles dont était accusé le directeur de l’établissement, Pierre Silviet-Carricart. L’épouse de François Bayrou s’était rendue à ses obsèques en 2000. Mediapart révèle également le 11 février 2025 que François Bayrou a été destinataire en mars 2024 d’une lettre écrite par Jean-Marie Delbos, témoignant des abus dont il a été victime à la fin des années 1950, et soulignant la responsabilité de « notables locaux » dans l’omertà qui pendant des décennies a entouré l’institution.
(2) en application, malgré la séparation des églises et de l’Etat, de la loi Debré de 1959 pour ceux qui relèvent de l’Éducation nationale et de la loi Rocard de 1984 pour ceux qui relèvent du ministère de l’Agriculture. Environ 96 % des établissements privés en France sont catholiques.
(3) détail complet des financements de l’État est consultable à :
https://www.budget.gouv.fr/documentation/documents-budgetaires/exercice-2024
(4) source Ministère de l’Éducation Nationale – Repères et Références Statistiques août 2023
(5) https://ekladata.com/FLieEVxm3z7QDT7BVuut87SwhMQ/Budget-2024-Financement-des-Ecoles-privees.pdf
(6) https://www.lemonde.fr/societe/article/2025/02/19/affaire-betharram-l-assemblee-vote-la-creation-d-une-commission-d-enquete-sur-la-prevention-des-violences-dans-les-etablissements-scolaires_6554694_3224.html
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autres sources:
. https://france3-regions.francetvinfo.fr/provence-alpes-cote-d-azur/bouches-du-rhone/marseille/financement-des-ecoles-privees-qui-paye-quoi-on-vous-explique-la-loi-et-les-polemiques-en-quatre-points-2910830.html
. www.ec84.org
. https://www.lagazettedescommunes.com/971841/lycees-prives%E2%80%89-enquete-sur-les-subventions-des-regions/
https://www.mcca-ain.org/rupture/wp-content/uploads/2025/02/Betharram.jpg.jpg
Sadisme, torture, crime en bande organisé, soumission sexuelle, pas moins de 13 religieux impliqués dans la domination sur mineur … au nom du dieu amour certainement.
https://www.francebleu.fr/infos/faits-divers-justice/le-pretre-accuse-d-agressions-sexuelles-au-canada-s-est-cache-pendant-22-ans-a-goult-1663177696
Le prêtre accusé d’agressions sexuelles au Canada s’est terré pendant 22 ans à Goult par ICI Vaucluse – Mercredi 14 septembre 2022
Le prêtre Joannes Rivoire est accusé d’avoir agressé sexuellement des enfants inuit dans les années 1960 dans le Grand Nord canadien. Sa congrégation prépare son exclusion et s’interroge sur le silence qui entoure son séjour au sanctuaire Notre-Dame-de-Lumière à Goult (Vaucluse).